On était à peine arrivés chez Arcangelo que ça tournait au vinaigre.
Ben oui, il est bête aussi Gabriel des fois, de s’effusionner à pleine bouche comme ça avec Arcangelo devant Yuri, avant de reprendre ses esprits et de devenir pivoine (il est trop mignon quand il rougit, des fois je lui fais raconter des trucs un peu salaces exprès pour que le rouge lui monte aux joues, et après je les mords).
Bon, pour ceux qui suivent pas, car je réalise que je commence sur les chapeaux de roues, je récapitule:
Arcangelo c’est le meilleur ami de Gabriel. Des fois aussi, ils baisent ensemble. Et Yuri c’est le petit copain de Gabriel, mais eux par contre ne copulent pas.
Arcangelo, qui n’est pas toujours aussi intelligent qu’il n’y paraît, a décidé de tous nous inviter chez lui en Italie pour Pâques : Gabriel, Yuri, mon frangin Calixte, mon faux fiancé Clément et moi (mais pas
Griotte, il est pas complètement idiot quand même).
Alors déjà que Yuri et Calixte ont du mal à s’entendre parce que Calixte est d’un vulgaire à pleurer quand il s’y met et que ça gêne Yuri. Qu’en plus Cl’m est tellement furieux que Calixte ait
cassé leur blog qu’entre eux deux c’est plutôt l’entente cordiale façon guerre froide : On est jamais à l’abri d’un blitzkrieg. Que Gabriel est un peu froid avec moi depuis qu’il roule vaguement des pelles à Yuri. Ajoutez la tension en triangle Yuri, Gab’, Arcangelo et vous avez le tableau complet.
Bref, je ne sais pas ce qui a pris à Arcangelo de lancer un plan si casse-gueule, mais comme on m’a dit qu’il y aurait du champagne, du shopping à faire et des Italiens à draguer, je suis venue. Il faut bien que je me rattrape de
cet été.
Pour vous dire à quel point c’était tendu, Cl’m est venu se réfugier dans la bibliothèque avec moi dès la première soirée, son Mac sous le bras.
- « Ah, vous êtes là. » il a soupiré, « Je ne vous ennuie pas ? »
- « Si, cassez-vous. J’aime lire en paix. » (en fait je me mettais des doigts en lisant un yaoi, mais ça il était pas obligé de le savoir.)
Sans plus de cérémonie Cl’m s’est installé dans un fauteuil et m’a jeté un regard désespéré pendant que je me léchais l’index en le dévisageant (mon regard à moi était torve, j’assume).
- « Je viens de semer Calixte qui voulait m’entraîner je ne sais où, et de fuir le salon ou Yuri et Arcangelo jouent aux coqs devant Gabriel, je crois qu’aucun d’entre eux ne se rend compte du ridicule de la situation. »
- « Vous croyez qu’ils vont se battre ? »
- « Je dois vraiment être désespéré pour me confier à vous, vous avez autant d’empathie qu’une huitre. »
- « Je sens meilleur de la moule. »
Clément allait rétorquer quand la porte s’est ouverte sur un Gabriel raide comme un piquet et aux yeux glacés. En mode colère noire quoi.
Il a pointé un doigt vengeur sur Clément et a dit :
- « Toi ! »
J’ai fui avant qu’il ne finisse sa phrase, Cl’m a l’habitude.
Bon, bien sûr dans le dédale de la baraque d’Arcangelo, je me suis perdue, et j’envisageais déjà d’écrire mon testament sur le mur à côté de l’endroit où l’on retrouverai 50 ans plus tard mon adorable petit corps momifié quand j’ai percuté Yuri de plein fouet en prenant un virage un peu raide.
- « Ah, vous tombez bien vous, pour une fois, vous savez où on est exactement ? »
- « Oui. »
- « Parfait, j‘ai dit, prise d‘une inspiration soudaine, s’il y a un salon pas trop loin, je crois qu’on va avoir une petite conversation.
- « C’est que je cherche Gabriel et… »
- « Je serais vous, je resterais à distance, je ne sais pas ce que vous avez trafiqué avec Arcangelo, mais mon tout doux est en mode serpent à sonnette. Cl’m va le désamorcer, il vous le rendra comme neuf, promis, en attendant, vous et moi, faut qu'on cause. »
Yuri a haussé les épaules et nous a assez vite conduit dans un salon où nous nous sommes installé face à face, un guéridon entre nous.
- « Yuri, je ne vais pas y aller par quatre chemins : Vous comptez le baiser quand, au juste, Gabriel ? »
Il a marqué un temps et m’a dévisagée avant de se lancer :
- « Votre question m'étonne, Framboise. Pour qui me prenez-vous en fin de compte ?
Gabriel et moi nous sommes embrassés pour la première fois à la Saint-Sylvestre et avons échangé quelques baisers depuis. J'imagine que, connaissant vos habitudes, vous devez trouver cela un peu frugal, mais pour moi Gabriel est un être d'une grande délicatesse et je m'en voudrais de le heurter en lui jetant mes désirs sauvages au visage.
Vous le connaissez bien. Vous avez vu ses lèvres ourlées ? Vous ne croyez pas que je rêve de voir mon gland glisser le long de cette petite moue boudeuse qu'il esquisse. Pendant notre voyage à Saint-Petersbourg, il a commandé un dessert aux cerises et j'ai du me contenir comme un forcené tellement il me mettait au supplice à chaque fois qu'il picorait un fruit pour le faire disparaître d'un coup de langue. C'est mon sexe tout entier que j'aurais voulu voir disparaître dans sa bouche soyeuse. Sentir la caresse de sa langue et la chaleur qui en émane. Je voudrais être l'objet exclusif de sa gourmandise et déverser mon sperme dans sa gorge pour qu'il me goûte au plus intime.
Et je l'imagine relevant la tête en souriant, un filet de sperme glissant négligemment le long de sa commissure. J'adorerais l'embrasser alors et goûter mon goût et le sien mélangé.
Vous savez Framboise, cela fait quelques temps que nous partageons un lit lors des nuits que nous passons ensemble et depuis peu il a renoncé à toute pudeur et me laisse profiter du beau spectacle de son corps nu. Il n'y a pas si longtemps, je sortais de la douche après une journée éreintante et la peau encore fumante.
Le pauvre Gabriel s'était endormi, terrassé de fatigue. Ses jambes entrouvertes se laissaient deviner sous le drap qui le couvrait à peine jusqu'à la taille. J'aurais voulu faire glisser ce fichu tissu, poser mes doigts brûlants sur la chair pâle de ses cuisses, contempler les belles rondeurs de ses fesses, la petite rosace qui s'épanouit entre elles et pencher mon visage vers son orifice et le caresser de ma langue avide. J'aurais voulu le lécher pendant un temps infini et sentir son sphincter se détendre et s'épanouir. Goûter à ce trou qui s'ouvrirait juste pour moi et troubler le sommeil de ce garçon jusqu'à se qu'il s'éveille et me réclame en lui.
Ne me regardez pas comme ça. Je suis un homme et j'assume ce dont j'ai envie.
Au lieu de ça, je suis retourné dans la salle de bain et je me suis masturbé jusqu'à ce que je sois assez vide pour retourner m'allonger près de lui sans risquer de le choquer d'un geste déplacé.
Gabriel m'évoque d'abord une gourmandise énorme. Je voudrais pouvoir le lécher intégralement, partout, pendant des heures, mordre sa gorge, ses épaules, son cul. Glisser mes doigts dans tous ses recoins, ses orifices et entendre jaillir de sa gorge les soupirs d'extase et de surprise qu'il nous laisse deviner en découvrant un cadeau ou en mordant dans une pâtisserie.
Vous l'avez bien regardé son cul ?
Vous avez vu comme il est rond et bombé.
Vous ne pouvez pas imaginez ce qu'on a envie de faire avec un cul pareil.
Quand nous nous embrassons lors de nos retrouvailles et que son corps touche le mien je voudrais glisser mes mains autour de sa taille et le retenir contre moi pendant que je m'empare de sa bouche, le sentir se débattre juste un peu et puis me céder. Se laisser faire, laisser mes mains toucher toutes les parties de son corps qu'il cache sous ses vêtements et puis le retourner pour lui faire sentir mon sexe raide.
Il est rêveur vous savez. Il peut passer un temps fou à une fenêtre, le menton dans le creux de la main. Je l'envisage souvent comme Baptiste Giabiconi sur cette photo de Lagerfeld. Penché au balcon, cambré comme une pouliche il tournerait la tête vers moi et me lancerait un regard de pure invitation auquel je ne résisterais pas une seconde.
Vous pensez toujours que je n'éprouve pour lui qu'un sentiment d'amitié fadasse.
J'ose même pas vous dire qu'il y a des moments ou je me sens vulgairement bestial. Je me considère comme un prédateur et j'ai honte de l'imaginer en vulgaire gibier parce que j'ai juste envie de le voir a quatre pattes sur le parquet et que tout ce qui me vient en tête c'est que je pourrai le monter comme le font habituellement les animaux. Je vois son profil, j'imagine sa joue sur le sol, ses yeux clos et ses gémissements. Je m'en fous de lui faire mal dans ces moments là. Je le veux trop et je j'ai envie d'être à l'intérieur de son corps le plus profondément possible. Le posséder entièrement et jouir en lui pour laisser ma marque.
Je me glisserais ensuite au sol pendant qu'il se relèverait et je verrais ma semence glisser le long de ses cuisses d'albâtre. Je l'imagine souillé, mais souillé par moi. Et ça me fait bander de vous dire ça.
Mais vous croyez vraiment que je peux dire des choses pareilles à un garçon fragile comme lui ? Vous croyez que je pourrais accepter une seconde qu'il se refuse à moi et me prive du bonheur de simplement passer du temps à ses côtés ?
Il n'y a pas un centimètre carré de son corps que je n'aimerais caresser, ou lécher. Vous l'avez déjà touché vous, mais vous n'imaginez pas ce qu'il représente pour moi.
Ne faites pas cette tête là, Framboise. Je sais que vous avez pris du plaisir avec lui et que vous regrettez que ce temps là soit passé.
Mais Gabriel est à moi maintenant. Et je le veux rien qu'à moi. J'espère que je suis très clair à ce sujet. »
- « Je tire pas la gueule, idiot, je mouille, ça va pas de me dire des choses pareilles ? J’ai personne à baiser ce soir pour faire passer l’envie moi. Alors que vous vous allez tirer votre crampe incessamment sous peu. »
- « Mais vous n’avez donc rien écouté ? »
- « Je me branlottais un peu quand vous parliez, mais si, j’ai tout bien compris : vous êtes con. Et vous n’avez rien compris à Gab’, donc là c‘est vous qui allez m‘écouter. Vous voyez pas qu’il attend que ça, crétin ? Que vous lui colliez votre langue partout, d’ailleurs insistez sur l’intérieur des cuisses, ça le fait gémir de façon super mignonne, et si vous regardez par en-dessous, il se mordille la lèvre inférieure quand on fait ça, c‘est à se pâmer de sexitude.
Non mais franchement, avoir Gabriel nu dans son lit et ne pas y toucher c’est un crime de lèse-sexualité! C’est pas parce qu’il dit rien qu’il ne le veut pas, il est peut être trop poli pour demander, je sais pas, moi, je lui ai jamais laissé le choix, mais y’a qu’à voir comme il vous regarde et comment ses yeux vous détaillent l’entrejambe pour comprendre que tout ce qu’il veut c’est que vous le preniez, et pas avec des pincettes croyez-moi. Le choix de l'étalon est assez discutable, mais, il a ses lubies, alors pourquoi pas, vous n’êtes pas pire qu’un autre.
Cela dit, croire que Gabriel est aussi innocent que l’air qu’il arbore la plupart du temps, c’est franchement faire montre d’un manque total de finesse, ce qui, pour un violoniste est assez affligeant. Alors, faites moi confiance, sauvez-nous du désastre et relâchez toute cette tension sexuelle : il vous veut et il doit être au bord de l'explosion de se retenir de baiser comme il le fait depuis des mois en attendant que vous franchissiez le cap de l'amour courtois.
Partez à sa recherche, et quand vous le trouverez, plaquez-le au mur, en lui attrapant fermement une fesse, faites-lui bien sentir votre sexe, roulez-lui une pelle monumentale, un peu comme celle que je vous ai roulé la dernière fois, même contre votre gré, je vous ai senti bander, mordez-lui le cou, murmurez-lui des saletés en russe, mentionnez bien que vous comptez lui coller votre sexe dans la bouche et quand il commence à haleter, traînez-le dans une chambre, n‘importe laquelle et là, arrachez-lui ses vêtements, et faites-le jouir. Faites-lui tout ce que vous m’avez décrit et faites-le bien, je veux l’entendre de ma chambre. Sinon, ça va mal se passer.
- « Vous êtes sûre que ?»
- « Quoi ?»
- « Vous allez bien ? Vous êtes…»
- « Allez vous-en, allez! Gabriel est tout à vous et vous, vous le laissez dépérir, ingrat !» j’ai haleté « Allez, partez... Mais euh, avant, vous auriez un mouchoir ? J’ai joui en vous imaginant, je suis toute mouillée.»
Yuri m’a tendu un mouchoir de percale en murmurant "Gardez-le" avec un drôle de regard, et il s’est éclipsé.
N’empêche que maintenant, ça va beaucoup mieux. Et personne ne m’a encore remercié.