01 décembre 2009

La chute de la Maison Hurtebise-1.

En pénétrant dans la demeure parentale, récemment désertée par Père, j'ai compris qu'effectivement il y avait un léger problème.


Bon soyons honnête, je le savais déjà. Depuis la "disparition" de Kelly, son chihuahua, Mère n'a plus toute sa tête. Mais c'est tellement plus simple de se voiler la face.
En tout cas moi je trouve.
Mais là, c'était un cas de force majeure.
Du genre grave.
Du genre "Il faut sauver le soldat Calixte".
Oui, parce qu'avec toutes ces histoires c'est lui qui a récupéré Père. (Techniquement tout ce petit monde loge plus ou moins chez mon "fiancé" Clément, mais lui on s'en fout.)
En apprenant la fuite de notre géniteur, samedi, j'ai pris sur moi et je me suis rendue à Epernay, au Domaine.
Et comme je l'expliquais quelques lignes plus haut, j'ai bien vu que Père n'exagérait pas.
Je suis passée par la porte de la cuisine histoire de pouvoir évaluer l'étendue des dégats avant de me lancer dans la mission que je m'étais assignée : rendre Mère à la raison. (ou rendre sa raison à Mère, au choix)

La cuisinière m'a accueillie d'un regard sombre. Sur une photo imprimée sur le devant de son tablier, Kelly, elle, me fixait d'un regard canin, larmoyant et légèrement taché de sauce au vin.
J'ai salué le plus courtoisement possible (la cuisinière pas la photo de Kelly), et je me préparais à lui dire que j'allais essayer d'arranger ça quand Mère est arrivée (elle ne va que rarement en cuisine mais je suppose que son sixième sens l'y a poussé dès qu'elle a senti ma présence).

-"Tiens Framboise, ça faisait une éternité. Tu as besoin d'argent ?"
J'ai choisi d'être directe.
-"Non, le cas échéant, j'aurais juste téléphoné à Père. Mère, je suis venue vous parler. Il y a quelque chose d'assez important dont je souhaiterais discuter avec vous."
-"Tu es enceinte ?"
Ca m'aurait presque semblé plus simple...
-"Non, Mère, il faut parler de Père. Ça ne peut plus continuer ainsi."
La cuisinière a soudain eu l'air très occupé.
" Si c'est ton père que tu cherche il est sûrement dans son bureau."
"Mère. Père est parti. Il habite chez Calixte depuis deux jours.Vous n'avez pas remarqué ?"

Il y a eu comme un blanc.
Mère a cligné des yeux. Deux fois de suite. C'est rare.
La cuisinière s'est doucement raclée la gorge. J'ai pris Mère par le coude et je l'ai emmenée dans le petit salon... Pardon le salon Kelly. Nonobstant les yeux qui me piquaient à chaque fois que mon regard croisait une photo de la chienne j'ai assis Mère presque de force dans un fauteuil orné d'un petit repose-tête à l'effigie de... bon, je vous laisse deviner.

Mère avait l'air un peu déstabilisée par la nouvelle. Et croyez moi, c'est rare.
- Mère. Avant Kelly. Nous avons eu d'autres chiens, n'est-ce pas ?
-Evidemment.
- Pourquoi ne pas vous en offrir un autre ?
Les sourcils de Mère se sont imperceptiblement rapprochés
- Kelly, c'est la fille que je n'ai jamais eu. Gentille et attentionnée. Elle faisait ma fierté en public, elle. Si un jour tu as des enfants, (là j'ai cru l'entendre murmurer "Dieu nous en garde") tu comprendras.

J'ai toujours été très surprise par ces gens tout à fait sains d'esprit qui, sur un sujet particulier, perdent tout sens des réalités.
Prenez ma copine Phryne, elle est bien sous tous rapports. Brillante, intelligente, assez dégourdie quand il s'agit d'autre chose que de sexe, et franchement, une jeune femme avec la tête sur les épaules. Pourtant, mentionnez le prénom de mon frère devant elle, elle perd la raison, l'usage de la parole, et la maîtrise de ses sphincters.
Mère c'est un peu pareil, mais avec Kelly.

Ca s'annonçait un peu difficile.
Mère m'a demandé ce qui avait poussé son mari à fuir.
Avant de me lancer sur la scène qui avait poussé Père à bout. J'ai voulu lui démontrer que c'était l'accumulation de faits qui avait provoqué la débâcle paternelle.
J'ai pris une tasse posée sur le guéridon en face de moi et je l'ai examinée attentivement tout en ordonnant mes pensées.
"Je ne savais pas qu'un artisan pouvait accepter de peindre la gueule d'un chien aussi laid sur une porcelaine aussi fine." fut d'ailleurs la première chose qui me vint à l'esprit. Mais je me gardais bien de formuler cette remarque à voix haute.

Après un examen minutieux de l'objet, j'étais prête :

J'allais tenter par l'exemple de démontrer à Mère qu'on pouvait parfaitement honorer la mémoire de sa chienne sans pour autant remplir la maison d'artéfacts de gout douteux ou convoquer ses amies à des séances de spiritisme canines quand... la tasse m'a échappée.

Bling.

...

La réaction de Gabriel la fois où on s'est battus, Clément et moi, en prenant pour munition ses assiettes Versace, c'était une légère brise printanière dans un cerisier en fleur comparée à celle de Mère.

(à suivre...)

5 commentaires:

Marc Noto a dit…

LA SUITE LA SUITE LA SUITE !!!

Non mais c'est pas humain, c'est pire que n'importe quel cliffhanger de série américaine là !!!

:)

Anonyme a dit…

Faites pas la maligne, cheurie, crachez le moreceau on a pas que ça à faire d'attendre de savoir si on renvoie votre père après l'internement de son épouse où si on s'arrange pour les rabibocher.

Framboise a dit…

nostramarcus, tiens un revenant. :) elle arrive. demain.

Cl'm Vous savez bien ce qu'il s'est passé ensuite. Je l'ai raconté à Calixte.

Anonyme a dit…

Je n'ai pas vu votre frère depuis vendredi passé et je m'en passe très bien.

Marc Noto a dit…

:). Je suis toujours là, juste un peu plus débordé qu'avant.

Bon... demain.... Patience....

Allez savoir pourquoi mais j'ai une image de ce genre en tête: http://tinyurl.com/y8jf9kq

:D